Plus de 100 millions de personnes sont dépendantes des activités aurifères dans le monde. En Tanzanie, de nombreuses mines artisanales assurent la subsistance de la population, tout en mettant gravement en danger la sécurité et la santé des travailleurs et travailleuses. SWISSAID fournit des équipements de protection aux mineuses et mineurs et les accompagne dans l’obtention de crédits.
En bref
But
Afin d’améliorer les conditions dans les mines d’or, SWISSAID, avec l’aide de ses partenaires Hakirasilimali et FADEV, soutient 10 mines modèles à fonctionner de manière à respecter les critères environnementaux et sanitaires. Une fois opérationnelles selon ces nouveaux standards, ces mines serviront d’exemples aux autres mines artisanales pour créer une dynamique au niveau local. En parallèle, des actions de plaidoyer seront menées au niveau local et national pour que le secteur de l’or artisanal dispose de meilleures réglementations et que celles-ci soient mises en œuvre.
Le projet est financièrement soutenu par la DDC.
Nous sommes en Tanzanie, au nord-ouest du pays. Au cœur d’un paysage verdoyant s’élèvent de hauts plateaux riches en minerai d’or. Lourdement chargés, des camions vrombissent en s’éloignant vers les grands centres. La zone est émaillée de puits improvisés, bordés de petites huttes, où des hommes et des femmes lavent et cassent la roche. La région de Geita est un haut lieu de l’or. On y afflue des quatre coins du pays. À la recherche d’un peu de bonheur, d’une once de chance. Et d’un petit revenu, alors envoyé aux proches pour soulager quelque peu la faim.
Le travail est dangereux, l’un des plus dangereux qui soient, particulièrement dans les petites mines privées informelles. Des accidents mortels surviennent régulièrement dans les puits étroits, qui se ramifient jusqu’à 50 mètres de profondeur. Bien souvent, des adolescent-e-s descendent dans les galeries et travaillent sept heures sous terre. L’air se fait rare. Les effets à long terme sont désastreux: l’air poussiéreux et la boue toxique laissent des séquelles dans les poumons, sur la peau et au niveau du cœur.
Petits et grands acteurs
Selon Theonestina Mwasha, ingénieure spécialisée dans les minéraux travaillant au sein de l’association FADEV, partenaire de SWISSAID, près de 1,5 million de personnes en Tanzanie tirent leur revenu de l’extraction de l’or, leur permettant de nourrir leurs familles. Un mineur pourvoit généralement à la subsistance de six personnes. Au total, près de neuf millions de Tanzaniennes et Tanzaniens dépendent donc de cette matière première scintillante, soit près de 15 % de la population.
À l’échelle planétaire, les chiffres se révèlent plus impressionnants encore: des études estiment que plus de 100 millions de personnes à travers le monde sont dépendantes des activités minières aurifères pour leur subsistance. Environ 80% de la production mondiale d’or est issue de mines industrielles, responsables d’importants dégâts environnementaux et sociaux. Ces gigantesques exploitations appartiennent à de grands groupes internationaux. Elles sont intégrées dans le commerce mondial, mais seule une petite partie de la population locale y trouve du travail.
Selon Theonestina Mwasha (en bleu), travailler dans les petites mines artisanales «est souvent la seule façon d’accéder à une vie indépendante». Ces mines qui représentent environ 20% des mines assurent davantage la subsistance de la population locale.
Pire encore, le moyen de subsistance de cette dernière lui est souvent volé. Les gens sont chassés et des campements informels apparaissent autour des grandes zones d’extraction. Le cyanure contamine les eaux souterraines. «Plusieurs études attestent que la sécurité alimentaire de la population vivant à proximité de certaines zones d’exploitation industrielles est affectée», souligne Marc Ummel, expert de l’or chez SWISSAID.
L’or provenant de petites mines artisanales – environ 20% – assure davantage la subsistance de la population locale. «Y travailler est souvent la seule façon d’accéder à une vie indépendante», commente Theonestina Mwasha
Mines artisanales précaires
Dans ces mines, les conditions de travail sont souvent précaires. Pour détacher l’or de la roche, les travailleuses et travailleurs utilisent du mercure: une menace persistante pour la santé humaine et environnementale. Par ailleurs, elles et ils n’ont pas d’accès direct au marché et aux crédits, devant, dans bien des cas, vendre leur or en deçà de sa valeur marchande.
SWISSAID et ses organisations partenaires entendent changer la donne. Depuis six ans, elles s’efforcent d’améliorer les conditions de travail et l’accès au marché dans les mines artisanales en Tanzanie. Elles réclament en outre une meilleure réglementation étatique.
Sur trois sites d’extraction, elles informent et sensibilisent les travailleuses et travailleurs sur les risques liés à la sécurité ainsi que sur les dangers pour l’environnement, tout en leur distribuant des équipements de protection. À Geita et à Kahama, les personnes ont reçu en octobre dernier 160 paires de gants, des casques, des réflecteurs, des bottes de sécurité et des lunettes de protection.
Pour de l'or équitable!
Crédits et matériel de protection
Josefina John fait partie d’un groupe de femmes soutenu par le projet. Elles apprennent à relever les données et à tenir une comptabilité correcte car, sans cela, elles n’obtiennent pas de crédits auprès des établissements financiers. Et sans crédit, il est tout bonnement impossible de décrocher des licences permettant de vendre l’or légalement et au prix du marché.
Le projet fournit également des équipements de protection aux travailleuses et travailleurs sur les sites d’extraction. Josefina se souvient encore le dur labeur sans protection. À force de marteler la roche, ses mains étaient pleines de crevasses sanglantes, au point que ses caresses étaient devenues désagréables pour ses enfants. Avec de solides gants, elle protège désormais ses mains et les lunettes font écran pour ses yeux. Et Josefina John de lancer: «Si tu es en sécurité, ta famille l’est aussi!»
La persévérance porte ses fruits
Ce travail sur le terrain ne représente toutefois qu’une goutte d’eau dans l’océan. C’est la raison pour laquelle SWISSAID, avec ses organisations partenaires, fait également du plaidoyer pour améliorer durablement les mines artisanales et offrir aux travailleuses et travailleurs un accès au marché étatique régulé. Marc Ummel en est convaincu: «Avec l’accès au marché légal et équitable des hommes et des femmes qui travaillent dans les mines, le monde dispose d’un puissant levier pour sortir durablement les pays du Sud de la faim.»