À la différence des pratiques courantes en Suisse, la plupart des agriculteurs produisent eux-mêmes leurs semences en Indonésie. Avec l’accord de libre-échange conclu dimanche dans le cadre de l’AELE, la Suisse oblige l’Indonésie à instaurer un système strict de protection des semences conforme à la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV 91). Cet acte interdit aux paysans non seulement la vente, mais également l’échange de semences issues de variétés protégées. La réutilisation de semences dans leur propre exploitation est en outre limitée à une liste restreinte de plantes et, généralement soumises au paiement de royalties. L’UPOV 91 limite ainsi fortement l’accès des paysans aux semences, ce qui bénéficie principalement à l’industrie semencière. Or, si les agriculteurs se retirent de la production et de la distribution de semences, cela aura également un impact négatif sur la sécurité alimentaire. La mise à mal des systèmes de semences paysannes entraîne également une perte de biodiversité. La production agricole devient ainsi plus vulnérable aux changements climatiques.

Les Nations unies ont adopté hier la Déclaration sur les droits des paysans et autres personnes travaillant dans les zones rurales, qui représente un jalon important dans la lutte contre la faim et la pauvreté. A l’instar d’une écrasante majorité de pays, la Suisse a voté en faveur de la Déclaration.

Il est donc incompréhensible que la Suisse exige quasi simultanément une protection stricte des variétés végétales en Indonésie. L’UPOV 91 est en effet incompatible avec le droit aux semences reconnu dans la Déclaration des Nations unies.

« Deux poids, deux mesures » en défaveur de l’Indonésie
L’exigence d’une protection stricte des variétés sur le modèle de l’UPOV 91 constitue un « deux poids, deux mesures » en défaveur de l’Indonésie. La Norvège, qui fait partie de l’Association européenne de libre-échange (AELE), n’est pas membre de l’UPOV 91 et n’applique donc pas ces normes. Au même titre que la Norvège, l’Indonésie devrait donc bénéficier d’une certaine flexibilité en ce qui concerne la protection des variétés végétales car la sécurité alimentaire du pays dépend du libre accès aux semences.

Alliance Sud, APBREBES, Pain pour le prochain, Pro Specie Racia, Action de Carême, Public Eye et SWISSAID appellent le Conseil fédéral à s’en tenir à la Déclaration sur les droits des paysans, y compris à l’étranger, et à renoncer à une protection renforcée des obtentions végétales dans les accords de libre-échange.

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